European Lab Forum 2016

Europe de la culture : année zéro

 

Au moment où les éditos des grands quotidiens européens prophétisent à la chaîne la fin pure et simple de l’Union européenne, victime de l’absence de vision, du populisme ou de la lâcheté d’une partie de ses dirigeants nationaux, l’Europe de la culture est en première ligne dans la période de profonds bouleversements que nous vivons, et dans laquelle nous cherchons de nouveaux chemins démocratiques.
 

Secouée par une triple phase de mutation – numérique, politique et citoyenne - une nouvelle génération de militants de la culture est au front de toutes les ruptures collatérales qui en découlent : crise budgétaire, crise de sens, revendications et crispations identitaires, fractures générationnelles, sociales et territoriales, apathie politique et citoyenne… Et bien sûr crise profonde du projet européen, dont le destin n’a jamais paru aussi fragilisé.
 

European Lab a pour ambition d’éclairer ces transformations du secteur culturel et créatif, en France et en Europe, à la lumière de l’enthousiasme, de l’imagination et du potentiel d’innovation de ces nouveaux activistes.
 

Cette génération des digital natives, celle aussi des european natives, et d’une certaine façon des crisis natives, cherche un nouvel horizon. Depuis plus de deux décennies, depuis la chute du mur de Berlin, elle a appris à se construire autrement, à inventer différemment les projets culturels, créatifs et artistiques qu’elle défend.
Elle a aujourd’hui la légitimité et les convictions pour apporter des réponses nouvelles aux crises qu’elle a appris à affronter, seule, au quotidien et sur tous les terrains.
 

Au cœur de l’orage, cette génération cherche à construire une « troisième voie » indépendante et engagée, au service de l’intérêt général, du bien commun et du renouvellement démocratique, à distance des schémas dépassés de la culture institutionnelle comme des modèles capitalistiques des grands groupes industriels, qui entrent aujourd’hui en force sur les ruines du champ médiatique et culturel.
 

Cette « génération gueule de bois » - comme la qualifie brillamment Raphaël Glucksmann – est aussi une génération déterminée à se battre, à dépasser les matins difficiles et à redessiner un horizon commun : elle peut en ce sens contribuer efficacement à redonner du sens au projet européen, notamment auprès d’une jeunesse qui s’en est profondément et parfois violemment éloignée.
 

A travers ses projets, ses nouveaux espaces, ses lieux, ses événements, ses médias, elle peut réhabiliter la culture dans sa fonction la plus essentielle : celle d’une arme de reconstruction massive au service d’une société européenne au bord de l’implosion démocratique.
 

Vincent Carry